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Réforme de la fiscalité automobile : La CODEF tire la sonnette d’alarme pour le secteur associatif et alerte sur un effet collatéral majeur pour l’intérêt général.

Bruxelles, le 20 octobre 2025 – La CODEF, fédération patronale du secteur associatif, alerte sur les effets collatéraux majeurs de l’extension de la réforme de la fiscalité automobile aux ASBL qui s’inscrit dans le cadre de la loi du 25 novembre 2021 et de clarifications administratives récentes du SPF Finances.

Cette loi, conçue initialement pour verdir le parc de voitures de société du secteur marchand (véhicules 100% électriques), sera prochainement étendue aux associations soumises à l’impôt des personnes morales (IPM). Son application en l’état actuel conduirait à partir du 1er janvier 2026 à :

  • soumettre à la taxation les remboursements, versés par les ASBL soumises à l’IPM, pour les déplacements professionnels et domicile-lieu de travail de leurs travailleurs qui utilisent leur propre véhicule créant une charge financière supplémentaire et une complexité administrative disproportionnée et inadaptée. Cette mesure mettrait en péril la soutenabilité d’organisations assurant des missions d’intérêt général, lesquelles mobilisent des milliers de travailleurs au service de la collectivité.
  • soumettre à taxation à l’IPM les véhicules propres aux ASBL, indispensables aux transports de personnes et à l’exécution des missions d’intérêt général. Cette mesure pénaliserait directement le service à la population et serait contraire aux impératifs de proportionnalité et de continuité du service.

Une mesure injuste, inefficace et inapplicable

La CODEF dénonce une mesure totalement inadaptée aux réalités du secteur non-marchand pour trois raisons :

1. Une menace directe pour les services d’intérêt général

Pour de nombreuses associations, la voiture n’est pas un avantage salarial, mais un outil de travail indispensable. C’est le cas pour les services d’aide et de soins à domicile, les taxis sociaux, les travailleurs sociaux « hors les murs », les services résidentiels ou encore le secteur socioculturel et jeunesse, les milieux d’accueil collectifs, etc. L’assimilation de ces remboursements à des “frais de voiture” imposables rognera directement les budgets des ASBL, mettant en péril la continuité des missions.

Pour comprendre l’importance du phénomène en Belgique et en l’absence d’une photographie de terrain solide et de statistiques publiques, la CODEF s’appuie sur la nature des missions et sur un indicateur juridique très parlant : l’existence d’indemnités kilométriques/temps de déplacement spécifiques dans les CCT ou barèmes sectoriels.

Dans une moindre mesure, certaines ASBL possèdent des véhicules de service. Ceux-ci peuvent être des véhicules adaptés PMR, TPMR, des minibus adaptés ou des taxis adaptés. Généralement, ils ont été financés par des dons citoyens, des financements publics, la Loterie Nationale, la Fondation Roi Baudouin, etc. Dès lors, taxer ces véhicules déstabiliserait des services reconnus comme missions d’intérêt général, créerait une rupture d’égalité par rapport aux exonérations admises pour les personnes en situation de handicap et/ou fragilisées, et alourdirait le coût d’accès à l’éducation, aux soins, à l’emploi et à la vie sociale.

2. Un risque d’exclusion des plus vulnérables

Incapables d’absorber ce surcoût fiscal, les associations ne pourront pas le répercuter sur leurs bénéficiaires, souvent des publics précarisés. La mesure risque donc de fragiliser des services de première ligne essentiels à la cohésion sociale et à l’intérêt général.

La preuve par l’exemple :

Prenons un service d’aide-ménagères sociales de 120 ETP qui rembourse en moyenne 9 000 km/an par travailleur à 0,4415 €/km = 476 820 € remboursés/an pour tous les travailleurs. Assimilés à des “frais de voiture” imposables à 25 %, cela représenterait 119 205 € d’impôt/an soit l’équivalent d’environ 3,5 ETP.

3. Un non-sens écologique et administratif

L’objectif de la loi est d’inciter les employeurs à choisir des véhicules électriques. Or, les ASBL n’ont aucun contrôle sur le type de véhicules personnels de leurs travailleurs. Assimiler les remboursements de kilomètres à des “frais de voiture” imposables n’a aucun effet climatique mais ajoute une obligation de traçabilité des véhicules privés et des données CO₂/km impossible à gérer. La réalité actuelle du marché confirme l’inefficacité de cette approche : 81,8 % des voitures 100 % électriques en Belgique sont des véhicules d’entreprises marchandes (les particuliers restent minoritaires) ; la prime d’achat flamande a été arrêtée pour 2025 et il n’existe pas de prime équivalente à Bruxelles et en Wallonie, alors que le coût d’acquisition demeure élevé pour un ménage moyen. Enfin, si la Belgique a franchi le cap des 100 000 points de recharge, le maillage reste très inégal (≈ 77 000 en Flandre, ≈ 13 000 en Wallonie, ≈ 9 700 à Bruxelles). Dès lors, taxer des remboursements sur des véhicules que l’employeur ne choisit pas ne verdit rien et pénalise les services d’intérêt général.

4. Un dispositif fiscal inéquitable pour le secteur associatif

La réforme de la fiscalité automobile, telle qu’elle doit s’appliquer à partir du 1er janvier 2026 aux ASBL soumises à l’impôt des personnes morales (IPM), introduit une série de distorsions fondamentales dans le traitement fiscal des associations par rapport aux entreprises soumises à l’impôt des sociétés (ISoc).

Dans le cadre de l’ISoc, l’incitation au verdissement s’opère par la réduction de la déductibilité fiscale des frais liés à des véhicules polluants. Les travaux parlementaires mentionnent la volonté de supprimer progressivement « une subvention indirecte des combustibles fossiles », subvention qui découle du régime fiscalement avantageux dont bénéficient actuellement les entreprises assujetties à l’ISoc.

À l’inverse, dans le régime IPM appliqué aux ASBL, cette logique ne tient pas car il n’y a pas de système de déduction prévu. Il ne s’agit ni d’un avantage fiscal à supprimer ou compenser, ni d’un véhicule mis à disposition par l’employeur. On parle ici d’une taxation directe sur des remboursements de frais engagés par les travailleurs, souvent à titre personnel – les frais de déplacement domiciles-lieu de travail ont juridiquement une nature privée – et pour des missions de service public. Dans de nombreux secteurs du non-marchand, ces remboursements font d’ailleurs l’objet d’une obligation légale de prise en charge par l’employeur et sont, dans certains cas, déjà taxés dans le chef des travailleurs au titre de rémunération. La fiscalité s’applique à une dépense contrainte, non à un choix.

À cela s’ajoute une situation déjà connue : de nombreuses ASBL, bien qu’assujetties à la TVA, sont exemptées en application de l’article 44 du Code TVA. Elles ne peuvent donc pas déduire la TVA sur leurs investissements ou leurs frais de fonctionnement, y compris ceux liés à la mobilité.

Ce handicap structurel crée une “double peine fiscale” : d’une part, des coûts plus élevés (véhicules, carburant, bornes), et d’autre part, une fiscalité IPM nouvelle qui vient s’ajouter à ces montants non récupérables. Le secteur marchand, lui, peut généralement compenser via le mécanisme classique de déduction.

Un appel à l’action et des solutions concrètes

Face à ce danger imminent, la CODEF demande au gouvernement de clarifier et de sécuriser rapidement le cadre réglementaire en vue d’exclure le secteur associatif de cette taxation injuste et disproportionnée.

Forte de sa connaissance du terrain, la CODEF se tient à la disposition des décideurs politiques pour élaborer des solutions pragmatiques, en conciliant la transition écologique et la continuité des services à la population.

Contact presse Passanisi Mathilda, porte-parole 📧 juriste@codef.be | 📞 043625225

À propos de la CODEF

La CODEF (Coordination et Défense des Services Sociaux, Culturels et Environnementaux) est une fédération patronale multisectorielle, pluraliste et indépendante. Reconnue comme organisation représentative, elle représente plus de 600 ASBL et coopératives d’économie sociale en Wallonie et à Bruxelles, employant plus de 6400 travailleurs.